Propositions d'écriture

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Flore lunaire

Présentation

Créer un monde, ça commence par la flore !

> Mon bouquet préféré (Extrait de Michel Butor, Herbier lunaire, La Différence, 1995.)
Nepentes sinus iridum
C’est la seule plante lunaire que l’on puisse nommer carnivore. Elle est dangereuse à l’extrême, car à l’aide de ses longs filaments vibratiles dont le fonctionnement est encore mal expliqué, elle est capable de paralyser l’astronaute et de perforer sa carapace pour lui arracher un petit morceau de chair. Elle est surtout friande de celle des lèvres. La blessure en fait est infime, mais le scaphandre se met à fuir. C’est pourquoi on est obligé de munir les explorateurs du Golfe des Iris de lourdes trousses de secours.

Hibiscus novus
On l’appelle parfois la fleur de ficelle et aussi la nouvelle amiante. Ses fibres souples, faciles à filer et tisser, sont en effet parfaitement incombustibles. C’est la matière première aujourd’hui non seulement de la plupart des tenues d’astronautes, mais aussi de celles des pompiers de la Terre. Seul inconvénient : l’extraordinaire vitalité de ces tissus qui peuvent bourgeonner soudain même après des années de mort apparente, surtout sous une lumière vive. Certaines variétés ont été obtenues pour réaliser des robes de soirée qui se recouvrent brusquement de fleurs sous les lustres.

Actinida nectaris
Les sexes sont séparés chez cette liane. Les deux individus sont toujours entièrement distincts, mais toujours étroitement enlacés. On n’a jamais jusqu’à présent découvert de célibataire. Les boutons en forme de cloche se réunissent pour constituer une fleur globuleuse qui de temps en temps émet une phosphorescence verdâtre et à d’autres moments une sorte de soupir flûté. De très beaux enregistrements ont été réalisés en disposant des micros sur les pétales.

Brassica ingenii
Les feuilles de ce chou ingénieux sont couvertes de lignes de caractères qui singent ceux de notre imprimerie. Un des triomphes de l’horticulture lunaire est l’obtention d’une variété qui, dans les meilleurs spécimens, d’une taille impressionnante, reproduit à peu près le texte du petit Larousse dans son édition de 1926. Mais rien jusqu’à présent qui évoque même de loin les illustrations.

Hypericum mortis
Comme chez les millepertuis terrestres les feuilles en transparence semblent perforées. Il s’agit en réalité de petites vitres serties dans la pâte nervurée. Les fleurs ont des pétales prismatiques qui décomposent la lumière solaire en innombrables arcs-en-ciel menus. La nuit les astronautes dirigent souvent leurs phares vers ces buissons qui prennent alors une luxuriance enivrante. S’ils se trouvent au fond d’un ravin, toutes les parois se mettent à ruisseler de couleurs.