Billets du lever

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Rêverie et podcast

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Rêverie et podcast

Alain Veinstein vilipende la pratique du podcast, il lui préfère une radio non différée, non déconnectée de son heure de diffusion, à son sens la seule radio qui sache faire vibrer la rareté de l’instant, quand la voix se fraie un chemin dans l’épaisseur noire, « ce fond de la nuit où il n’y a plus d’autre issue que de parler pour voir ».
Il me semble comprendre ce qu’il veut dire, encore que, sauf erreur de ma part, il n’enregistre pas de nuit, ses invités s’engouffrent à neuf heures du matin dans l’ascenseur situé à l’entrée B de la Maison de la Radio, avec leur bonne voix du matin, reposée et caféinée, leur salive claire sur des dents fraîchement brossées. Mais quand même, malgré ce décalage horaire biologique et physiologique, je crois comprendre ce qu’il veut dire.
Pour moi, quelle que soit l’intensité de la lumière et l’heure qu’il est, il suffit qu’il n’y ait plus de visage pour créer le noir et la nuit. Il suffit de l’absence d’un visage qui parle pour ouvrir la perspective de l’intimité et préfigurer un endormissement d’enfant à qui on raconte une histoire.
Hier soir, avant de me coucher, j’ai longuement choisi mon podcast, je l’ai choisi selon mon humeur, selon mon degré de léthargie, selon l’intensité de ma peur de l’insomnie, puis j’ai glissé ma tablette tactile sous mon oreiller. « La radio doit dire le soir aux âmes malheureuses, aux âmes lourdes : ‘Il s’agit de ne plus dormir sur terre, il s’agit de rentrer dans le monde nocturne que tu vas choisir’ » écrit Bachelard dans Rêverie et radio.