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Les dictionnaires étymologiques nous ont toujours dit et répété que le mot auteur vient du latin augere, qui signifie faire croître, augmenter. Et comme ces dictionnaires ne sont pas illustrés, on ne sait ni comment ni où ni pourquoi croît ce qui croît.
Pour tenter de comprendre mieux l’étymologie d’un mot si sacré qu’il est devenu un vêtement précieux ou un statut, l’atelier intervient comme l’un de ces documentaires efficaces qu’on nous passait en classe de troisième, longues séquences intelligentes et colorées où des cinéastes pédagogues jouaient à accélérer le voyage des spermatozoïdes, faisaient du géant avec le microscopique (ou l’inverse) pour les besoins de la démonstration.
Sitôt que le participant à un atelier reçoit, de la bouche ou de la main de l’animateur, la proposition d’écriture du jour, assortie d’un texte exemplaire, il devient étymologiquement un auteur. Il n’invente pas, c’est rare, il préfère partir de ce qui existe déjà, qu’on vient de lui faire découvrir, qu’il a pour tâche maintenant d’augmenter. Sa réflexion et son imagination s’exercent donc sur ce qui est déjà écrit par un autre. Ainsi le participant se conduit-il en auctor, en vrai Latin qui pille les Grecs, s’enrichit tout en s’efforçant de préserver son identité, multiplie, rallonge, complète, retend, stimule, renforce, accroît, redouble, exhausse, aggrave ce qu’il vient de conquérir par sa lecture.
On recevra ici, en sus, un éclaircissement sur certaine confusion. L’existence même des ateliers hérisse tous ceux qui pensent qu’ils n’ont d’autre but que celui, artificiel et malfaisant, de former et d’entraîner, en plein jour, des équipes entières d’auteurs approximatifs et falsifiés. À tous, il faut rappeler fermement que le participant à l’atelier d’écriture n’est pas un usurpateur mais bien un auteur, au sens étymologique le plus pur, tant qu’il est là pour accroître et non pour s’en faire accroire.